jeudi 1 avril 2010

crazy heart



Une fois n'est pas coutume; on va chroniquer un film. Bon d'abord le synopsis: vieille gloire de la country, "Bad Blake", est sur la route la plupart du temps, dans une voiture qui a tout du corbillard, allant de villages paumés en villages paumés, jouant ses chansons dans les bowlings ou les bars d'une amérique anonyme où la moyenne d'âge avoisine la cinquantaine. Ce qui lui reste de célébrité s'évanouit peu à peu. Le mieux qu'il puisse espérer aujourd'hui, est de faire la première partie de Tommy Sweet, qui fut son protégé et à qui il a tout appris. S'éteignant à petit feu au McClure, ne composant plus, ringard, dépassé, Blake semble pourtant se contenter de cette vie ; il lui arrive même de dégoter une groupie pour ne pas finir la nuit seul. Jusqu'au jour où le vieil ours est interviewé par Jean, une jeune journaliste dont il va s'éprendre : un film sur la rédemption donc (rédemption, un bien grand mot qui veut juste dire: arrêter de faire les conneries qui font qu'on se fait l'effet d'une merde et commencer à faire des choses qui nous rendent un peu plus fiers de nous). Du déjà vu sans doute, mais, hé, quand c'est bien fait, c'est toujours la première fois.

Malgré le thème ultra-hollywoodien, ce film humble ne tombe jamais dans les pièges du genre. La course aux oscars semble être le cadet des soucis du réalisateur Scott Cooper, dont la mise en scène sert avant tout à faire briller ses acteurs, bien servis par un scénario remarquablement écrit qui va au plus simple et évite l'esbrouffe (certains critiques imbéciles ont taxé le film de convenu; comprenez dépourvu de rebondissements factices et arbitraires ce qui, il me semble, est plutôt une qualité). Cooper, qui sait que le sujet du film, pourrait s'avérer plombant, tempère intelligement les situations un peu trash (du genre dégeulis dans les chiottes) par un humour bienvenu.

Le désormais oscarisé Jeff Bridges endosse le rôle titre avec un naturel confondant (notamment pendant les scènes de concert), jamais dans la performance ou le cabotinage; il confère aux changements qui s'opèrent chez Blake une précision, une véracité et une grâce désarmante. Pour lui donner la réplique, Colin Farrel, qui depuis 2-3 ans fait des bons films ("bons baisers de Bruges", "le rêve de Cassandre"), l'immense Robert Duvall dans un petit second rôle, comme toujours épatant, et bien sûr l'adorable Maggie Gyllenhaal, irréprochable elle aussi.

Puisse ce film réhabiliter un style de musique (la country donc) au sujet duquelle quelques malentendus, pas toujours injustifiés cela étant, perdurent: en gros, la country serait une musique de cul-terreux rougeauds bas-du-front. Première fausse croyance rétablie: l'auto-destruction et l'hédonisme coupable n'étaient pas l'apanage des rockers: Johnny Cash fut très longtemps camé jusqu'au yeux, Georges Jones allait chercher de l'alcool en moissoneuse lorsque sa femme avait caché les clefs de la voiture...Le film retranscrit aussi très justement l'atmosphère des états du sud américain (on aurait presque envie de prendre son billet pour le texas). Ces paysages filmés en grand angle contribuent à la beauté virginale d'un film incroyablement attachant qui fait mouche sur tout les tableaux. .

Vianney G.

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