vendredi 15 octobre 2010

Bon son ne saurait mentir



De ce groupe dont le chanteur a tout de l'orang-outan, j'avais ouï dire des choses intrigantes; qu'ils faisaient des concerts en jogging (j'ai moi même déjà donné un concert dans un collant de course en lycra rose), qu'ils étaient les protégés de Noel Gallagher (de loin le moins con des deux frères), qu'ils vénéraient Love et les Kinks, qu'ils seraient LE groupe le plus sous-estimé des années 2000. Autant dire que ma curiosité fut excitée comme rarement.

Autant tuer le suspense dans l'œuf : je fus déçu. A l'écoute des précédents albums surnageait l'impression d'entendre un solide CV de références sixties plutôt qu'une inspiration en propre. Je les trouvais un peu trop roués, un peu trop experts pour tout dire. Personne n'aime qu'on lui fasse des appels de pied trop insistants, ce qui était la mauvaise habitude des Coral et est encore le cas avec la pochette furieusement rétro de ce nouvel album.

On ne sait si cela provient de leur extraction (ils sont de Liverpool, comme les Beatles mais aussi comme les La's, groupe formidable d'un seul album dont on aimerait qu'il soit moins culte et que plus de gens l'écoutent) mais les Coral, à défaut d'avoir du génie, ont malgré tout un savoir-faire. Ils savent écrire une chanson, ils savent quel accord doit aller derrière tel accord pour que ça sonne bien. Ce modeste (dans le bon sens du terme) artisanat (toujours dans le bon sens du terme) pop donne occasionnellement lieu à de petites merveilles sans âge: "Jacqueline" (adorable cette chanson) , "Don't think you're the first" , "Fireflies", "Pass it on", "Put the sun black"... Mais les albums, jamais il ne me serait venu à l'idée d'en acheter un. Jusqu'à aujourd'hui.

"C'est notre meilleur album", assure le chanteur James Skelly. On sait ce que vaut ce genre de déclaration bravache auquel un groupe recourt le plus souvent lorsqu'il est en fait sur le déclin, croyant sans doute en une miraculeuse valeur performatrice de leur parole,supposée conjurer un état de fait cruel qu'il refuse de voir et d'accepter avec grâce; c'est triste mais c'est humain. Sauf que là en l'occurrence c'est exact; ce Butterfly house est bien leur meilleur album. Il suffit pour s'en convaincre d'écouter "Roving jewel", "Butterfly house" et ce break superbe à 1:58, "Green is the colour", "Another way", "North parade" ... Rien de fondamental dans l'idée, on retrouve toujours cette obsession pour un psychédélisme léger et la scène folk-rock des sixties (Byrds, CSN&Y, Lovin Spoonful...), toujours ce même chant accablé très beau à ses meilleurs moments, toujours ses guitares cristallines. Oh ce n'est pas groundbrêkingeu mais c'est damn well fait, et mine de rien l'un des meilleurs nouveaux trucs que j'ai entendus en 2010, même si l'album n'est pas exempt de certains défauts (une certaine indolence, une certaine joliesse un peu déplacée parfois comme sur "Falling all around you"...).

Et preuve supplémentaire s'il en fallait une, les incapables de Pitchfork n'ont pas aimé, déplorant " a déjà vu sens of pastiche". Ce qui est idiot évidemment. Je suspecte personnellement ceux qui trouvent la pop des Coral passéiste d'être les mêmes qui s'extasient de la pâtée imbitable que nous ressort régulièrement Radiohead. C'est au contraire la marque des bons que de savoir se confronter à la tradition sans que ça sente le faisandé. Et c'est la première fois que les Coral relèvent le pari sur la distance d'un album. (fort heureusement il est probable qu'avec cet album, l'audience des Coral suivra une pente plus favorable que celle du lectorat dudit magazine).

A l'aéronef le 5 novembre.

Vianney G.

1 commentaire:

  1. Vianney dans un collant de course en lycra rose : Je suis en appétit !!!

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