
Malgré la maladie, son premier album, "you got my mind messed up", réussit à s'installer confortablement dans les charts R&B de 1967 grâce notamment à "the dark end of the street", récit douloureux d'un amour adultérin: un des plus grands morceaux soul jamais entendus . Ecoutez ça, ça donnera tout de suite un peu de cachet à une déprime passagère. Carr ne retrouvera pas les sommets himalayens de ce morceau (ni lui ni personne d'autre d'ailleurs) mais livrera pour le modeste label Goldwax de plus que délectables moments de soul. Ses deux albums (parfaitement réédités chez Kent) constituent un répertoire restreint (50 titres à tout péter) mais invariablement génial, que Carr se transforme en soul pleureur (très douteux ce jeu de mots) sur "life turned her that way", "these ain't raindrops", "search your heart" et son final en apothéose, qu'il rayonne dans son désespoir ("pouring water on a drowning man", " i sowed love and reaped a heartache", "lucky loser") ou qu'il se remémore sa jeunesse sur des titres gospel ("to love somebody" des Bee Gees, "let it happen"). Sans rival dans le registre "ballade soul qui fait chialer", Carr est aussi un expert des up-tempo qui bottent le cul (le génial "losing game" , "sock it to me baby", le langoureux et bluesy "you don't want me"), lorgnant même parfois vers le funk ("stronger than love", "love is a beautiful thing", "who's been warming my oven"). Sa voix caverneuse et implorante transforme tout en or, et même une reprise étonnante, tendre et belle à pleurer du "ring of fire" de Johnny Cash.
Certains esprits chagrins déploreront une proximité vocale trop grande avec le bon Otis. James s'approprie bien certains de ses tics ("you got to...you got to got to got to", ce genre de choses) mais après avoir écouté ça, le doute n'est plus permis: James enterre Otis. Mais l'histoire est à peine commencé que c'est déjà la fin. Carr présente des signes de plus en plus préoccupants de déséquilibre mental (aggravés par une consommation immodérée de joints ). Après une tentative de come-back désastreuse (lors d'une date au japon, Carr, apparement bourré d'anti-dépresseurs se fige devant l'audience, incapable de sortir le moindre son) et deux albums anecdotiques sortis en 1991 et 1994, Carr s'éteint dans l'indifférence générale en 2003 alors que des "greatest hits" de Lionel Richie (beuh) ou Seal (re-beuh) se vendent par camions entiers. Va comprendre...
A écouter également : "a man needs a woman" (idéale pour sortir du métro), le féministe "you gotta have soul", "row row your boat", "you got my mind messed up" , "dixie belle"...Vous avez tout écouté? Bien. C'est le moment d'un petit tour sur Amazon .
Vianney G.
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